Comment comptabiliser les mesures de soutien aux entreprises ?
Nous détaillons les recommandations de l’ANC concernant l'allocation d'activité partielle, l'aide du fonds de solidarité et le remboursement anticipé de crédit d'impôt. Par ailleurs, nous analysons la comptabilisation des autres mesures mises en place pour soutenir les entreprises suite à la crise du Covid-19.
Allocation(s) d’activité partielle
Dispositifs d'allocation d'activité partielle et d'activité partielle de longue durée
La crise sanitaire liée au Covid-19 a amené les pouvoirs publics à renforcer le dispositif d’activité partielle (loi 2020-473 du 25 avril 2020, art. 20, JO du 26). Le principe de cette allocation demeure identique : l’employeur verse au salarié une indemnité équivalente à 70 %, sauf pour les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation, ce qui correspond en moyenne à environ 84 % du salaire net du salarié dans la limite d’une rémunération de 4,5 SMIC, avec un minimum de 8,03 € par heure (8,11 €/heure depuis le 1er janvier 2021). L’employeur reçoit une allocation couvrant cette indemnité. Le paiement de cette allocation est effectué par l'Agence de services et de paiement (ASP) qui agit pour le compte de l'État.
En outre, les entreprises peuvent, sous certaines conditions, bénéficier du dispositif d'activité partielle de longue durée (APLD) depuis le 1er août 2020 en cas de réduction d'activité durable mais dont la pérennité n'est pas compromise (loi 2020-734 du 17 juin 2020, art. 53, JO du 18 ; questions-réponses du ministère du Travail sur l'APLD du 22 octobre 2020). Ce n’est pas un dispositif pérenne et les entreprises peuvent transmettre leur demande de recours à l’APLD à l’administration jusqu’au 30 juin 2022.
À partir du 1er janvier 2021, les indemnités légales d’activité partielle sont soumises à la CSG/CRDS au titre des revenus de remplacements aux taux respectifs de 6,2 % et 0,5 %, après abattement d’assiette de 1,75 % (loi 2020-1576 du 14 décembre 2020, JO du 15, art. 8). Pour 2021, le régime subit quelques adaptations : notamment, l'allocation remboursée aux entreprises sera de 60 % ou 70 % selon les cas (ord. 2020-1639 du 21 décembre 2020, JO du 23 ; décret 2020-1628 du 21 décembre 2020, JO du 22 ; décret 2020-1681 du 24 décembre 2020, JO du 26 ; décret 2020-1786 du 30 décembre 2020, JO du 31).
Comment comptabiliser ces allocations ?
L’allocation d'activité partielle est inscrite en comptabilité dès que l’entreprise respecte les conditions de fond et de forme ouvrant droit à cette allocation. Lorsque l’entité reçoit de l’État une allocation couvrant l’indemnité qu’elle verse à son salarié en activité partielle, elle doit l'inscrire au crédit d’un compte de charges de personnel. Il est recommandé de ne pas porter cette allocation en produit exceptionnel. Lorsqu’une entité a déjà reçu une indemnité de cette nature par le passé, elle peut soit continuer à utiliser le même mode de comptabilisation, soit suivre la recommandation de l’ANC, cette dernière devenant alors le nouveau mode de comptabilisation soumis à la permanence des méthodes (ANC, « Recommandations et observations relatives à la prise en compte des conséquences de l’événement Covid-19 dans les comptes et situations établis à compter du 1er janvier 2020 », 18 mai 2020, mise à jour au 8 janvier 2021, rec. J1 et B6A). Ce compte peut être le même que celui dans lequel est comptabilisée l’indemnité versée au salarié (6414), ou un autre compte (6491). Le compte débité en contrepartie pourra être à notre avis le 443 « Opérations particulières avec l'État ». L'opération peut, selon nous, être comptabilisée dès que la prise en charge par l'État est acquise (obtention de l'autorisation) sans qu'il soit nécessaire d'attendre le remboursement effectif par l'État.
Hors contexte de la crise sanitaire, en pratique, les entités avaient pris l'habitude de comptabiliser l’allocation d'activité partielle en charge au compte 641 « Rémunérations du personnel ». En cas de prise en charge par l’État, les sommes remboursées étaient créditées dans le compte 791 « Transferts de charges d’exploitation » ou, éventuellement, dans le compte 641.
L'allocation d'activité partielle de longue durée (APLD) suit, à notre avis, le même traitement comptable.
Aides du fonds de solidarité
Rappel du dispositif
Dans le cadre de la crise sanitaire, les entreprises des secteurs les plus touchés par la crise et ceux des secteurs qui en dépendent (secteurs dits « connexes ») peuvent demander à bénéficier de l’aide du fonds de solidarité de la part de l’État, si elles remplissent les conditions nécessaires (décret 2020-371 du 30 mars 2020 modifié par le décret 2020-1620 du 19 décembre 2020).
Comment les comptabiliser ?
Selon l’ANC, cette aide est à inscrire en subvention d’exploitation (compte 74) dès lors que l’entité en a fait la demande et estime en respecter les conditions d’octroi (ANC, rec. J2).
Fiscalement
Les aides versées par le fonds de solidarité sont exonérées d’IS, d'IR et de contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle pour les exercices clos à compter du 21 mai 2020 (loi 2020-473 du 25 avril 2020, art. 1er ; décret 2020-765 du 23 juin 2020, JO du 24 ; décret 2020-1770 du 30 décembre 2020, JO du 31).
Remboursements anticipés de crédit d’impôt et de TVA
Rappel du dispositif
Les sociétés qui bénéficient d'un ou plusieurs crédits d'impôt restituables en 2020 ont pu demander le remboursement du solde de la créance disponible, après imputation le cas échéant sur leur impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice 2019, sans attendre le dépôt de la liasse fiscale. De même, les remboursements de crédit de TVA seront en principe accélérés.
Comment les comptabiliser ?
Le remboursement anticipé d’un crédit d’impôt et de TVA n’entraîne aucun impact au compte de résultat. Il s'agit en effet d’une modification de la procédure administrative sans incidence sur le fait que ces produits sont acquis à l'exercice concerné (PCG art. 512-4; ANC, rec. J3).
Aide en faveur des investissements des PME et ETI industrielles
Aide en faveur des PME au sens communautaire investissant dans des équipements robotiques et de transformation numérique
Dans le cadre du plan de relance de l'économie, de nouvelles aides (exclusives du régime de suramortissement) peuvent être allouées aux activités industrielles éligibles. Parmi elles figure l'aide en faveur des investissements des PME et ETI industrielles (décret 2020-1621 du 19 décembre 2020 modifiant le décret 2020-1291 du 23 octobre 2020 ; arrêté du 23 octobre 2020, JO du 24, texte 49). Les entreprises concernées sont celles dont l'effectif salarié ne dépasse pas 250 salariés, le chiffre d'affaires n'excède pas 50 M€ ou le total de bilan 43 M€ (règlt UE 651/2014 du 17 juin 2014, JOUE L. 187/1 du 26, annexe I) qui investissent dans des équipements robotiques et des investissements de transformation numérique (les investissements éligibles sont identiques à ceux ouvrant droit au dispositif exceptionnel de suramortissement pour ce type de biens ; CGI art. 39 decies B ; BOFiP-BIC-BASE-100-30-§ 50 à 120-15/05/2019).
Comment la comptabiliser ?
Le régime de cette aide devrait, à notre avis, suivre celui des subventions d'équipement. Rappelons que les subventions d’équipement versées par l’État ou les collectivités publiques pour l’acquisition ou la création d’immobilisations déterminées peuvent ne pas être comprises dans le résultat de l’exercice en cours à la date de leur versement, mais être rapportées aux résultats des exercices ultérieurs selon un rythme particulier qui diffère suivant qu’elles sont utilisées, soit à la création ou à l’acquisition d’immobilisations amortissables, soit à la création ou à l’acquisition d’immobilisations non amortissables (CGI art. 42 septies, 1). Ce régime revêt un caractère optionnel. Les entreprises qui n’optent pas pour l’application de ce régime doivent comprendre les subventions d’équipement dans les résultats de l’exercice en cours à la date de leur attribution.
Les subventions d’équipement dont bénéficie l’entité pour acquérir ou créer des immobilisations sont inscrites au compte 131. Les autres subventions d’investissement dont bénéficie l’entité pour financer des activités à long terme sont inscrites au compte 138. Le compte 131 (ou 138) est crédité de la subvention par le débit du compte d’actif intéressé (compte de tiers ou compte financier). Le compte 139 est débité par le crédit du compte 777 « Quote-part des subventions d’investissement virée au résultat de l’exercice » (PCG art. 941-13).
Aides en faveur de la décarbonation
Dispositifs favorisant la « décarbonation » des activités industrielles
Le plan de relance a aussi donné le jour à des aides en faveur de la décarbonation. L'aide en faveur de la décarbonation des outils de production industrielle vise les industries manufacturières ou tout tiers-financeur d'une telle entreprise industrielle réalisant des investissements de décarbonation de leur outil de production, ne dépassant pas 3 M€ ; l’aide peut être demandée jusqu’au 31 décembre 2022 (décret 2020-1361 et arrêté du 7 novembre 2020, JO du 8). Ont également vu le jour une aide en faveur des investissements pour la décarbonation de l'activité industrielle, une aide au fonctionnement pour la chaleur bas carbone industrielle et une aide au fonctionnement pour la vente de matières plastiques issues du recyclage (décret 2020-1485 du 1er décembre 2020, JO du 2). Tout comme l’aide en faveur des investissements des PME et ETI industrielles (voir ci-avant), ces aides ne sont pas cumulables avec le dispositif de suramortissement des équipements robotiques et investissements de transformation numérique (CGI art. 39 decies B).
Comment les comptabiliser ?
Comme l'aide en faveur des investissements des PME et ETI industrielles, les aides en faveur de la décarbonation devraient, selon nous, suivre également le régime des subventions d'équipement (voir ci-avant).
Autres mesures de soutien aux entreprises
Report d’échéances de dettes financières
Le report de remboursements de dettes financières jusqu’à 6 mois est sans effet sur la présentation des dettes au bilan (ANC, rec. H6) (voir fiche 6 « Covid-19 : impacts sur les dettes »).
Prêts garantis par l’État
Les prêts garantis par l’État (PGE) sont comptabilisés en compte 164 pour leur valeur nominale (ANC, rec. H1 et H2) (voir fiche 6 « Covid-19 : impacts sur les dettes »).
Rééchelonnement ou report de règlement de dettes fiscales et/ou sociales
Le rééchelonnement ou le report de règlement de ces dettes ne modifie pas leur nature et n’a donc aucun effet sur leur comptabilisation initiale (ANC, rec. H3 et H4) (voir fiche 6 « Covid-19 : impacts sur les dettes »).
Réductions et rabais auprès de tiers
Différents cas de figure influent sur le traitement comptable de rabais ou concessions de loyers (ANC, rec. K2 et J5) (voir fiche 7 « Covid-19 : impacts sur certains produits et charges »).
Subvention « Prévention Covid » et aides versées par l'Agefiph
La subvention « Prévention Covid », destinée à aider les TPE et les PME à s'équiper contre le Covid-19 au travail, est une aide de l'Assurance Maladie destinée aux entreprises de 1 à 49 salariés dépendant du régime général, à l’exclusion des établissements couverts par la fonction publique territoriale ou la fonction publique hospitalière. Cette aide est, à notre avis, à enregistrer en compte 74 « Subventions d'exploitation ». Il en est, selon nous, de même pour les aides versées par l'Agefiph (dont la durée est prolongée jusqu'au 28 février 2021), pour financer des équipements spécifiques de prévention du risque Covid-19, afin de soutenir la conclusion de contrats d'apprentissage ou de professionnalisation et maintenir dans l'emploi les personnes handicapées.
Aides exceptionnelles versées par le CPSTI
Le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI) (c. séc. soc. art. L. 641-5 et L. 651-1) et les instances de gouvernance des sections professionnelles de la CNAVPL (Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales) et de la CNBF (Caisse nationale des barreaux français) ont été autorisés à affecter en 2020 une partie des réserves financières des régimes d'assurance vieillesse complémentaire et des régimes d'invalidité-décès dont ils assurent la gestion, au financement d'une aide financière exceptionnelle destinée aux cotisants de chacun de ces régimes et à leurs conjoints collaborateurs afin de faire face aux difficultés liées à l'épidémie (loi 2020-734 du 17 juin 2020, art. 10). À l’instar du fonds de solidarité (voir ci-avant), ces aides sont exonérées d'IS, d'IR et de contributions et cotisations sociales (BOFiP-BNC-BASE-20-20-§§ 572 et 573-30/12/2020). Dans la mesure où l’AFE est octroyée au cotisant et non à l’entité, le Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables recommande l’enregistrement de l’aide perçue, dans les comptes sociaux de l’entité, dans le compte courant du cotisant qui en bénéficie (compte de classe 4) et non dans un compte de produits (compte 74 « Subventions d’exploitation » ) comme nous avions pu le supposer. Il en est de même pour une entreprise individuelle : le compte 108 « Compte de l’exploitant » est crédité (CSOEC, Avis 2021-01 « Traitement comptable des aides financières exceptionnelles (AFE) versées par les caisses complémentaires des indépendants », 5 février 2021).