Aides « coûts fixes » : un avis du CSOEC précise les diligences de l'expert-comptable
Une nouvelle aide, complémentaire au fonds de solidarité, a été mise en place depuis janvier 2021, afin de compenser les coûts fixes qui ne sont pas couverts par les recettes, les assurances ou les aides publiques des entreprises. Elle est destinée aux entreprises les plus lourdement affectées par la crise, et se base sur le montant des pertes brutes d’exploitation (excédent brut d’exploitation négatif) qui est calculé et/ou attesté par un expert-comptable ou un commissaire aux comptes, tiers de confiance (voir panorama de l'actualité de ce numéro « Aides coûts fixes : le rôle du CAC »).
Le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables a publié un avis qui précise les modalités de calcul de l'EBE prévu par les dispositions réglementaires (CSOEC, avis 2021-03 bis « Modalités de calcul de l’excédent brut d’exploitation dans le cadre du décret 2021-310 du 24 mars 2021 modifié par décret 2021-625 du 20 mai 2021 », du 25 mai 2021). Une note relative aux diligences de l'expert-comptable sur l'attestation à émettre est également parue (CSOEC, note « Attestation coûts fixes - Diligences à mettre en œuvre » du 31 mars 2021).
Nous développons dans le présent article les diligences de l'expert-comptable et, notamment, son attestation qui accompagne la demande d'aides « coûts fixes ». Le rôle du CAC est détaillé dans le panorama d'actualité de ce numéro RF Comptable.
Nouveau dispositif « coûts fixes »
Compenser le poids des charges fixes sur le 1er semestre 2021...
Trois nouvelles aides « coûts fixes »
Les entreprises dont l'activité est lourdement affectée par la crise sanitaire peuvent désormais bénéficier d'aides de l'État destinées à compenser leurs dépenses de charges fixes particulièrement élevées, au titre du 1er semestre de l'année 2021 (décret 2021-310 du 24 mars 2021, JO du 25). Les modalités d’octroi et de détermination de ces aides ont fait l’objet d’aménagements dans le cadre d'un décret tout récemment paru (décret 2021-625 du 20 mai 2021, JO du 21). Le dispositif d'aides « coûts fixes » mis à jour se compose :
-d'une aide coûts fixes originale qui comprend notamment :
-une option pour apprécier les critères d'éligibilité entre une maille bimestrielle (existante avant le nouveau décret) et une maille mensuelle (nouvelle), à compter de la deuxième période éligible, soit mars 2021 (voir ci-après) ;
- un maintien des mêmes conditions de perte de 50 % de chiffre d’affaires (voir ci-après) au cours de la période éligible (soit mensuelle soit bimestrielle) ;
-ou un EBE « coûts fixes » négatif (voir ci-après), analysé au niveau du mois calendaire ou de la période éligible bimestrielle ;
-un versement de l'aide « coûts fixes » originale qui continue à avoir lieu tous les deux mois.
Le nouveau dispositif d'aide « coûts fixes » aura un impact sur davantage d'entreprises, du fait de la nouvelle possibilité de demander cette aide, alors que les entreprises ne répondent aux critères d'éligibilité que sur un seul des deux mois de la période éligible, à compter de la deuxième période éligible, soit mars 2021.
-d'une aide «coûts fixes saisonnalité » (nouvelle) qui peut être calculée sur une période de six mois (tant pour la perte de 50 % de chiffre d’affaires que pour le calcul de l'EBE « coûts fixes ») ;
-d'une aide « coûts fixes groupe » (nouvelle) à laquelle seuls sont éligibles les groupes qui saturent les montants maximums d'aides versées au titre du fonds de solidarité (décret 2020-371 du 30 mars 2020) ou au titre des aides temporaires de 1,8 M€.
Conditions à remplir
Pour bénéficier de ces aides, des conditions strictes sont à remplir par l'entreprise, qui varient en fonction de l'aide demandée, notamment (décret 2021-310 précité, art. 1, I et II, art. 7 modifiés et art. 12 créé par décret 2021-625 précité, art. 1) :
-bénéficier de l'aide fonds de solidarité ;
-avoir subi la perte d'au moins 50 % du chiffre d'affaires sur la période éligible, mensuelle ou semestrielle, sous réserve de certaines sous-conditions de taille et de secteur d'activité ;
-avoir été créée au moins deux ans avant le premier jour de la période éligible ou avant le 1er janvier 2019 pour l'aide « coûts fixes saisonnalité » ;
-présenter un excédent brut d'exploitation (EBE) négatif au cours de la période éligible ;
-avoir réalisé, pendant au moins un mois de la période semestrielle de référence de 2019, un chiffre d'affaires mensuel inférieur à 5 % du chiffre d'affaires annuel 2019 pour l'aide « coûts fixes saisonnalité ».
On notera que les entreprises exerçant à titre principal une activité de holding(s) ne sont pas éligibles au dispositif.
Trois périodes éligibles
Trois périodes éligibles sont recensées sur le début de l'année 2021 pour lesquelles l'aide « coûts fixes » peut être demandée (décret 2021-310 précité, art. 4, I ; FAQ, « Aide dite coûts fixes », mars 2021) :
-première période éligible : janvier-février 2021 ;
-deuxième période éligible : mars-avril 2021 ;
-troisième période éligible : mai-juin 2021.
Nouveaux délais des demandes d'aides
La demande d'aide est réalisée par voie dématérialisée, après le versement de l'aide fonds de solidarité (FSE) au titre du second mois de la période éligible dans un délai qui a été allongé (15 à 45 jours après le versement de l'aide FSE). Si le demandeur n'est pas éligible à l'aide FSE au titre du second mois de chaque période éligible, la demande d'aide est réalisée dans un délai de 45 jours à l'expiration de la période éligible. Pour la première demande au titre des mois de janvier 2021 et de février 2021, le délai est allongé au plus tard dans un délai de 45 jours à compter du 21 mai (jour de la publication du nouveau décret) (décret 2021-310 précité, art. 4, I modifié par décret 2021-625 précité, art. 1).
Au titre de l'aide « coûts fixes saisonnalité », une demande unique d'aide est réalisée par voie dématérialisée, et est déposée entre le 1er juillet 2021 et le 15 août 2021 (décret 2021-310 précité, art. 10, I créé par décret 2021-625 précité, art. 1).
Une des entreprises du groupe, au nom de l'ensemble des entreprises du groupe, peut déposer, depuis le 21 mai (date d'entrée en vigueur du décret 2021-625) et au plus tard avant le 31 juillet 2021, une demande unique d'aide par voie dématérialisée (décret 2021-310 précité, art. 14, I créé par décret 2021-625 précité, art. 1).
La demande d'aide est effectuée par voie dématérialisée sur le site impots.gouv.fr dans l’espace professionnel de l’entreprise.
Aides plafonnées et non cumulables
L’objectif de cette nouvelle aide est de compenser le poids des charges fixes de certaines catégories d’entreprises dans la limite de 10 M€ sur le 1er semestre 2021.
Une entreprise pourra atteindre le plafond de l'aide dès sa première demande pour la période de janvier-février 2021.
Il est à noter que les aides « coûts fixes » et « coûts fixes saisonnalité » ne sont pas cumulables. Si l'entreprise qui demande l'aide « coûts fixes saisonnalité » a déjà bénéficié de l'aide « coûts fixes » pour une ou deux périodes éligibles lorsqu'elle fait sa demande au titre de la période semestrielle, le montant de l'aide « coûts fixes » déjà versé sera déduit du mondant de l'aide « coûts fixes saisonnalité » auquel elle a droit (décret 2021-310 précité, art. 8, IV créé par décret 2021-625 précité).
En outre, le montant total des aides perçues par les entreprises d'un même groupe est limité sur la période du 1er semestre 2021 à un plafond de 10 M€ calculé au niveau du groupe (décret 2021-310 précité, art. 13, III créé par décret 2021-625 précité).
L'ensemble des aides perçues (activité partielle, exonérations de charges, fonds de solidarité, etc.) ont pour effet d'augmenter l'EBE et de diminuer l'assiette de l'aide « coûts fixes » (FAQ, « Aide dite coûts fixes », mars 2021).
... avec des objectifs chiffrés
L'aide constitue une subvention de l'État, dont le montant est calculé selon les modalités récapitulées dans le tableau ci-dessous.
Montant des aides « coûts fixes » | |||
---|---|---|---|
Aide « coûts fixes » : aide complémentaire bimestrielle (décret 2021-310, art. 2, I modifié par décret 2021-625, art. 1) | Aide « coûts fixes » : aide complémentaire mensuelle à compter du mois de mars (décret 2021-310, art. 2, I modifié par décret 2021-625, art. 1) | Aide « coûts fixes saisonnalité » pour les entreprises domiciliées dans une commune mentionnée à l'annexe 3 du décret 2020-371 du 30 mars 2020 (décret 2021-310, art. 8, I modifié par décret 2021-625, art. 1) | Aide « coûts fixes groupe » pour les entreprises n'ayant pas bénéficié du fonds de solidarité du seul fait de son plafonnement au niveau du groupe (décret 2021-310, art. 13, II créé par décret 2021-625, art. 1) |
Le montant de la subvention s'élève : -à 70 % de l'opposé mathématique de l'EBE « coûts fixes » constaté au cours de la période éligible ; -à 90 % de l'opposé mathématique de l'EBE « coûts fixes » constaté au cours de la période éligible, pour les petites entreprises (1). | À compter de l'aide au titre de la deuxième période éligible, le montant de la subvention s'élève : -soit à 70 % de l'opposé mathématique de l'EBE « coûts fixes » constaté au cours du premier mois éligible ou au cours du second mois éligible ; -soit à la somme pour chacun des deux mois éligibles de 70 % de l'opposé mathématique de l'EBE « coûts fixes » du mois éligible ; -soit à 90 % de l'opposé mathématique de l'EBE « coûts fixes » constaté au cours du premier mois éligible ou au cours du second mois éligible, pour les petites entreprises (1) ; -soit à la somme pour chacun des deux mois éligibles de 90 % de l'opposé mathématique de l'EBE coûts fixes du mois éligible, pour les petites entreprises (1). | Le montant de la subvention unique s'élève : -à 70 % de l'opposé mathématique de l'EBE coûts fixes constaté au cours de la période semestrielle ; -à 90 % de l'opposé mathématique de l'EBE coûts fixes constaté au cours de la période semestrielle pour les petites entreprises (1). | Le montant de la subvention unique correspond à la somme des aides dues à chaque entreprise éligible faisant partie d'un groupe pour une, deux ou trois périodes éligibles ou pour la période semestrielle. Au titre de chaque période éligible ou, le cas échéant, au titre de la période semestrielle et pour chaque entreprise, le montant de l'aide est calculé selon les modalités fixées à l'article 2 ou, le cas échéant, à l'article 8 (voir colonnes ci-contre). |
(1) Les petites entreprises sont celles qui occupent moins de 50 personnes et dont le total du chiffre d'affaires annuel ou le total du bilan annuel n'excède pas 10 M€ (FAQ, « Aide dite coûts fixes », mars 2021). |
Attestation(s) de l'expert-comptable
Pièce justificative de la demande d'aides
La demande d’aides « coûts fixes » doit, notamment, être accompagnée d’une attestation d’un expert-comptable, agissant en tant que tiers de confiance, délivrée conformément à la norme professionnelle relative aux attestations particulières (NP 3100), selon un niveau d’assurance raisonnable (décret 2021-310 précité, art. 4, II, 2°).
Le CSOEC a, à cet effet, rédigé une note dont l'objectif est d’accompagner les experts-comptables dans la mise en œuvre des diligences nécessaires pour être en mesure d’établir chaque attestation, avec le niveau d’assurance raisonnable prévu par le décret (CSOEC, « Attestation coûts fixes - Diligences à mettre en œuvre » du 31 mars 2021).
Contenu de l'attestation ou des attestations requise(s)
Montants d'EBE et de chiffre d'affaires pour les aides « coûts fixes » et « coûts fixes saisonnalité »
La mission de l’expert-comptable consiste à attester (décret 2021-310 précité, art. 4, II, 2° et art. 10, II, 2°) :
-le montant de l’excédent brut d’exploitation (EBE) pour la période des deux mois de 2021 au titre de laquelle l’aide est demandée et à compter de la 2e période éligible pour chaque mois de 2021 au titre de laquelle l'aide est demandée (ou pour la période semestrielle dans le cas de l'aide « coûts fixes » saisonnalité) ;
-le chiffre d’affaires pour chacun des 2 mois de 2021 de la période au titre de laquelle l’aide est demandée (ou pour chacun des 6 mois de 2021 de la période semestrielle dans le cas de l'aide « coûts fixes » saisonnalité) ;
-le chiffre d'affaires de référence pour chacun des 2 mois de 2019 pour la période au titre de laquelle l'aide est demandée (ou pour chacun des 6 mois de 2019 pour la période semestrielle dans le cas de l'aide « coûts fixes » saisonnalité) ;
-un mois de la période semestrielle de référence de 2019 au cours duquel le chiffre d'affaires mensuel est inférieur à 5 % du chiffre d'affaires annuel 2019, dans le cas de l'aide « coûts fixes » saisonnalité.
La perte de chiffre d’affaires est la différence, entre, d'une part, le chiffre d'affaires constaté au cours de la période considérée et, d'autre part, le chiffre d'affaires de référence défini comme le chiffre d'affaires réalisé durant la même période de l'année 2019 (décret 2021-310 précité, art. 3). Par exemple, les chiffres d'affaires additionnés au titre des mois de janvier et février 2021 par rapport à la somme des chiffres d'affaires des mois de janvier et février 2019. Il n'est pas possible de choisir la moyenne mensuelle 2019, comme pour le fonds de solidarité (FAQ « aides dite coûts fixes », mars 2021).
Autres mentions contenues dans l'attestation « coûts fixes » et « coûts fixes saisonnalité »
L'attestation de l'expert-comptable doit également mentionner (décret 2021-310 précité, art. 4, II, 2° et art. 10, II, 2°) :
-le numéro de formulaire de l’aide reçue au titre du fonds de solidarité pour chacun des mois de la période éligible considérée, au moins une fois au cours de la période considérée du 1er janvier 2021 au 30 juin 2021 dans le cas de l'aide « coûts fixes saisonnalité » . Lorsqu'une entreprise ne peut pas bénéficier, pour l'un des 2 mois de la période éligible, de l'aide reçue au titre du fonds de solidarité, l'expert-comptable doit attester qu'elle ne remplissait pas les critères demandés permettant le bénéfice de cette aide au titre du mois concerné (décret 2020-371, art. 4, II, 2°) ;
-le numéro professionnel de l'expert-comptable ;
-si l'entreprise appartient à un groupe, les noms, raisons sociales et adresses des sociétés du groupe.
Attestation supplémentaire pour certaines activités
Pour les entreprises exerçant leur activité principale dans un secteur mentionné à la ligne 9 de l'annexe 1 du décret, à savoir la location et la location-bail d'articles de loisirs et de sport ou du commerce de détail d'articles de sport en magasin spécialisé lorsqu'au moins 50 % du chiffre d'affaires est réalisé dans la vente au détail de skis et de chaussures de ski (rédaction en vigueur au 21 mai 2021), une attestation de l'expert-comptable, tiers de confiance, confirmant que l'entreprise remplit les critères prévus par cette annexe, est à prévoir en pièce justificative de la demande d'aide (décret 2020-371, art. 4, II, 5°).
Attestation « groupe »
Par ailleurs, pour les groupes de sociétés, une attestation dite « attestation groupe » d'un expert-comptable, tiers de confiance, pour chaque période éligible pour laquelle l'aide est demandée et pour chaque entreprise du groupe demandant l'aide « coûts fixes » et « coûts fixes saisonnalité », y compris les entreprises ayant perçu l'aide fonds de solidarité (décret 2021-310 du 24 mars 2021, art. 14, II créé par décret 2021-625 du 20 mai 2021, art. 1) mentionne :
-le montant de l'aide du fonds de solidarité reçue, par chaque entreprise, s'il y a lieu, pour chacun des deux mois de chaque période éligible. Si l'entreprise n'a pas pu bénéficier du fonds de solidarité au titre de l'un des mois en raison de l'application du plafond mensuel de 200 000 € au niveau du groupe ou du plafond visé au point 17 de la décision de la Commission européenne du 20 avril 2020 notifiée sous le numéro SA. 56985 telle que modifiée par la décision de la Commission européenne du 16 mars 2021 notifiée sous le numéro SA. 62102 (allant de 100 000 € à 800 000 € selon les secteurs d'activité ; https://www.europe-en-france.gouv.fr/sites/default/files/decision_commission_regime_cadre_temporaire_sa.56985.pdf ; https://www.europe-en-france.gouv.fr/sites/default/files/sa.62102_amendement_aux_regimes_sa.56709_sa.56985_sa.56868_sa.57219_sa.57367_sa.57695_sa.57754_et_sa.60965.pdf), l'expert-comptable atteste qu'elle remplissait les conditions requises et n'a pu percevoir l'aide du seul fait du plafonnement ;
-l'EBE coûts fixes, pour chaque entreprise et pour chaque période éligible ou, le cas échéant, pour la période semestrielle de 2021 au titre de laquelle l'aide est demandée.
Modèles d'attestation « coûts fixes » de l'expert-comptable
Le modèle d’attestation ne faisant pas référence à l’ensemble des éléments prévus par la norme, le rapport d'assurance ne doit pas faire référence à la NP 3100 (NP 3100, § 32). Les experts-comptables sont tenus de se conformer au modèle d’attestation fourni par la direction générale des finances publiques (DGFiP), disponible sur le site www.impots.gouv.fr (décret 2021-310, art. 4, II, 2°).
Deux modèles d'attestation sont fournis par le CSOEC, selon les deux cas suivants :
-si l'expert-comptable réalise l’attestation pour un client historique, l’expert-comptable contribue à l’élaboration de l’information faisant l’objet de l’attestation (mission de tenue comptable, de présentation des comptes annuels et d’assistance à la déclaration de TVA…) ;
-si l'expert-comptable intervient pour un nouveau client, ce dernier a préparé un document annexé au rapport qui présente les informations à attester.
Niveau d'assurance raisonnable
Normes de référence
L'attestation de l'expert-comptable est délivrée à la suite d'une mission d'assurance de niveau raisonnable réalisée conformément à la norme professionnelle de maîtrise de la qualité (NPMQ), à la norme professionnelle relative à la mission de présentation de comptes (NP 2300) et à la norme professionnelle relative aux missions d'assurance sur des informations autres que des comptes complets historiques - attestations particulières (NP 3100), élaborées par le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables (décret 2021-310 précité, art. 4, II ; 10, II et 14, II).
Une mission d'assurance de niveau raisonnable est une mission à l’issue de laquelle l'expert-comptable émet une opinion d’un niveau d’assurance élevé mais non absolu.
Diligences à mettre en œuvre
Pour atteindre le niveau raisonnable de l’assurance, tel qu’il est prévu dans le décret, il peut être mis en œuvre certaines diligences en fonction du jugement professionnel de l'expert-comptable. Celles citées dans la norme professionnelle sont indicatives et non limitatives (NP 3100, §§ 19 à 21).
Il revient au professionnel de sélectionner les diligences à mettre en œuvre en fonction de sa connaissance de l’entité. Les deux techniques suivantes peuvent, notamment, être utilisées :
-l'appréciation du contrôle interne ;
-la confirmation externe.
Appréciation du contrôle interne. Dès lors que le professionnel est en mesure d’apprécier le comportement et l’éthique du dirigeant, l’implication de ce dernier dans le processus d’autorisation et de contrôle des opérations peut constituer un élément de contrôle interne pertinent pour l’attestation que le professionnel peut utiliser afin d’alléger les procédures mises en œuvre pour obtenir un niveau d’assurance raisonnable.
Confirmation externe. Lorsque l’intervention de l’expert-comptable a lieu plusieurs semaines après la clôture ou la période concernée, le professionnel peut estimer pertinent de valider la réalité des créances/dettes, et donc du chiffre d’affaires/charges, par les encaissements/décaissements intervenus sur la période subséquente.
Source. CSOEC, note « Attestation coûts fixes - Diligences à mettre en œuvre » du 31 mars 2021.
L’appréciation de l’étendue des travaux à mettre en œuvre dépend des diligences qui ont pu être réalisées dans le cadre d’une éventuelle autre mission.
Le jugement professionnel est également déterminant pour évaluer les diligences complémentaires à mettre en œuvre pour atteindre un niveau d’assurance raisonnable. En complément, l’expert-comptable peut demander à la direction de l’entité de lui confirmer certains points ou d'étayer certains éléments, dans le cadre d’une lettre d'affirmation.
Focus sur le cas des entreprises dont les comptes sont certifiés par un CAC
Pour les entreprises ayant bénéficié du fonds de solidarité et dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes, l'attestation de l'expert-comptable peut être remplacée par (décret 2021-310 précité, art. 4, III ; 10, III et 14, III) :
-une attestation de l'entreprise ;
-et par une attestation du commissaire aux comptes, tiers de confiance indépendant, réalisée dans le respect des dispositions du titre II du livre VIII du code de commerce, de la réglementation européenne et des principes définis par le code de déontologie de la profession.
L'attestation, remplie et signée par l'entreprise, comporte des mentions proches de celles contenues dans l'attestation de l'expert-comptable (voir ci-avant).
L'attestation de l'entreprise et celle du CAC sont conformes au modèle établi par la direction générale des finances publiques, disponible sur le site www.impots.gouv.fr.
S'agissant des diligences propres au CAC, il convient de se référer au panorama de l'actualité de ce numéro « Aides coûts fixes : le rôle du CAC ». La CNCC vient tout juste de publier deux avis techniques portant sur les attestations du commissaire aux comptes relatives, d'une part, aux montants de l'EBE « coûts fixes » et du chiffre d'affaires et, d'autre part, au résultat net, auxquels nous consacrerons un prochain article.
Comment calculer l'excédent brut d'exploitation ?
Cadre de référence
Pour le calcul de l’excédent brut d'exploitation « coûts fixes », l’expert-comptable se réfère aux dispositions réglementaires (voir la formule ci-dessous) (décret 2021-310 précité, annexe 2 modifiée par décret 2021-625, art. 1) et à la foire aux questions (FAQ) publiée par le gouvernement (FAQ « aides dite coûts fixes », mars 2021 ne tenant pas compte des mises à jour du nouveau décret 2021-625 précité).
En outre, le Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables a émis un avis doctrinal afin de préciser le mode calculatoire de l’EBE, sur lequel l'expert-comptable pourra également s'appuyer (CSOEC, avis 2021-03 bis du 25 mai 2021 tenant compte des mises à jour du nouveau décret 2021-625 précité).
Calcul de l'EBE « coûts fixes »
L'excédent brut d'exploitation coûts fixes est calculé ou vérifié, pour chaque période éligible concernée, par un expert-comptable, ou par un commissaire aux comptes, tiers de confiance, à partir du grand livre de l'entreprise ou de la balance générale à l'aide de la formule de calcul recommandée (voir ci-après) (décret 2021-310 précité, annexe 2 modifiée par décret 2021-625, art. 1). L'entreprise bénéficie de l'option la plus favorable (décret 2021-310 du 24 mars 2021, art. 2, II modifié par décret 2021-625 du 20 mai 2021, art. 1).
Formule de calcul de l'EBE « coûts fixes »
EBE = [Recettes + subventions d’exploitation + redevances (acquises) pour concessions, brevets, licences, marques, procédés, logiciels, droits et valeurs similaires – achats consommés – consommations en provenance de tiers – charges de personnel – impôts et taxes et versements assimilés – redevances (versées) pour concessions, brevets, licences, marques, procédés, logiciels, droits et valeurs similaires].
En pratique, cette formule revient à effectuer la somme de l’ensemble des écritures des comptes suivants pour la période concernée :
EBE = [comptes 70 + comptes 74 – comptes 60 – comptes 61 – comptes 62 – comptes 63 – comptes 64 – compte 651 + compte 751].
L’EBE est ainsi calculé de la manière suivante (PCG art. 842-1) :
+ Ventes de marchandises (comptes 707 – comptes 7097 Rabais, remises, ristournes accordés)
– Achats de marchandises (comptes 607 – comptes 6097 Rabais, remises, ristournes obtenus)
+ comptes 6087 Frais accessoires incorporés aux achats le cas échéant +/– comptes 6037 Variations de stocks
+ Production vendue (comptes 70 hors comptes 707 inclus ci‐dessus) – comptes 7097 Rabais, remises, ristournes accordés (hors ceux inclus ci‐dessus) + Production stockée (comptes 71)
+ Production immobilisée (comptes 72) – déstockage de production
– Achats consommés (comptes 60 hors ceux inclus ci‐dessus)
– Consommations en provenance de tiers (comptes 61 et 62)
+ Subventions d’exploitation (comptes 74)
– Charges de personnel (comptes 64)
– Impôts et taxes (comptes 63)
+ Redevances pour concessions, brevets, licences, marques, procédés, logiciels, droits et valeurs similaires (comptes 751)
– Redevances pour concessions, brevets, licences, marques, procédés, logiciels, droits et valeurs similaires (comptes 651)
Les charges de personnel comprennent les rémunérations des salariés et des dirigeants, ainsi que les indemnités de gérance.
Un modèle de formulaire de calculs de l’aide coûts fixes et de l'EBE, répondant aux attentes du Ministère de l'économie des finances et de la relance ainsi qu'à celles des Finances publiques, sous la forme d'un fichier de format .xlsx est mis à disposition des experts-comptables sur le site de l'Ordre des experts-comptables. Il devrait, à notre avis, être prochainement mis à jour des dernières modifications issues du décret 2021-625.
Zoom sur le calcul de la variation de stocks
Selon que l'entité tient ou non un inventaire permanent
L’EBE négatif, pris en compte pour demander l’aide « coûts fixes », intègre dans son calcul la variation des différentes natures de stocks détenus par l'entité. Les modalités de calcul de la variation des stocks sont déterminées de la manière suivante (CSOEC, avis 2021-03 bis précité) :
-si l’entreprise dispose d’un outil de suivi informatique (de type ERP/progiciel de gestion intégré) lui permettant de tenir un inventaire permanent, elle s’appuie sur les données dont elle dispose pour calculer la variation des stocks ;
-si l’entité ne tient pas un inventaire permanent de ses stocks et décide de procéder à un inventaire physique, elle communique alors à son expert‐comptable un inventaire détaillé à l’ouverture et à la clôture de la période bimestrielle ou mensuelle.
Par simplification
Le cas échéant et, par simplification, le CSOEC recommande de recourir à une méthode reposant sur un calcul de la variation de stocks à partir du taux de marge commerciale du dernier bilan arrêté dès lors qu’il est considéré par le dirigeant que cette méthode d’approximation est fiable et peut suppléer l’absence de réalisation d’un inventaire physique (CSOEC, avis 2021-03 bis précité).
État des stocks
Sur la variation des stocks, l'expert-comptable peut également être amené à demander un état des stocks (quantité et/ou valeur) à l’entreprise.
Dépréciation des stocks
La variation de stocks peut inclure, au choix de l'entreprise pour le mois de mars ou le mois d'avril 2021, la perte de valeur des stocks calculée en multipliant le stock présent en fin de période par le taux de dépréciation des stocks tel qu'il résulte des comptes approuvés lors de la clôture du dernier exercice (décret 2021-310, annexe 2 modifiée par décret 2021-625, art. 1 ; CSOEC, avis 2021-03 bis précité).
Prise en compte de toutes les aides publiques
Toutes les aides dont l’entreprise a pu bénéficier, qu’elles aient été comptabilisées sous la forme d’un produit ou d’une réduction de charges, doivent être prises en compte dans le calcul de l’EBE « coûts fixes » (dès lors qu’elles se rattachent à l’exploitation de l’entreprise) (CSOEC, avis 2021-03 bis précité).
Si les aides sont passées par un compte de transfert de charge, le CSOEC recommande qu’elles soient réintégrées dans le calcul de l’EBE « coûts fixes ».
Attention particulière sur les traitements et salaires
Pour l’ensemble des rémunérations versées par l’entreprise, les rémunérations et les charges prises en compte sont nettes des aides reçues, tels que le chômage partiel ou les remises accordées par l’URSSAF, ou les organismes sociaux ou de retraites (CSOEC, avis 2021-03 bis précité).
Le CSOEC recommande qu’une attention particulière soit portée en cas d’évolution récente et anormale du salaire pris en considération au titre de la période de déclaration ou le maintien d’un niveau de salaire élevé alors que l’activité est interrompue.
Le dirigeant doit alors être en mesure de justifier que la rémunération octroyée a fait l’objet d’une décision dûment autorisée et formalisée, dès lors que cela est requis par les textes.
Proratisation des produits et charges annuels
Lors du calcul de l’EBE « coûts fixes » au titre d’une période bimestrielle ou mensuelle, le CSOEC recommande de proratiser les charges et les produits qui interviennent annuellement, via le mécanisme des comptes de régularisation (charges et produits constatés d’avance…), comme s’il s’agissait d’établir un arrêté intermédiaire.
Une attention particulière doit être portée pour les opérations de « cut off », afin d’avoir une bonne appréhension des charges et produits relatifs à l’EBE « coûts fixes » et au chiffre d'affaires des périodes concernées (CSOEC, avis 2021-03 bis précité).
Le dispositif « coûts fixes » 2021 a évolué. Il comporte désormais une aide « coûts fixes » originale, une aide « coûts fixes saisonnalité » et une aide « coûts fixes » groupe qui viennent en complément de l'aide fonds de solidarité (FSE).
Une des conditions d'éligibilité majeure des entreprises à cette aide, sous réserve de conditions de taille ou de secteur, demeure la réalisation d'un excédent brut d'exploitation (EBE) négatif sur la période considérée.
La mission de l’expert-comptable consiste, notamment, à calculer et attester le montant de cet EBE.
Sa mission, en position de tiers de confiance, est une mission d'assurance raisonnable qui représente un niveau d'assurance élevé mais non absolu.
L'attestation de l'expert-comptable peut être remplacée par une attestation de l'entreprise et par une attestation du CAC, tiers de confiance indépendant, pour les entreprises bénéficiant du fonds de solidarité et dont les comptes sont certifiés par un CAC.
Pour le calcul de l'EBE, les recommandations du CSOEC portent, notamment, sur le calcul de la variation de stocks, la prise en compte des opérations de cut-off et des points d'attention identifiés.