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Comptabilité Arrêt de cour d'appel Droit d'accès de l'expert comptable assistant le comité d'entreprise en vue de la consultation sur les orientations stratégiques de l'entreprise Le contexte : expert comptable assistant le comité d'entreprise consulté annuellement sur les orientations stratégiques de l'entreprise - Chaque année, le comité d'entreprise est consulté sur les orientations stratégiques de l'entreprise, définies par son organe chargé de l'administration ou de la surveillance, et sur leurs conséquences sur l'activité, l'emploi, l'évolution des métiers et des compétences, l'organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l'intérim, à des contrats temporaires et à des stages, ainsi que sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et sur les orientations de la formation professionnelle (c. trav. art. L. 2323-10 codifié L. 2323-7-1 avant son transfert par la loi 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi). La base de données économiques et sociales est le support de la préparation de cette consultation. Le CE peut se faire assister de l'expert comptable de son choix dans ce cadre. Il contribue, en principe, sur son budget de fonctionnement, au financement de cette expertise à hauteur de 20 % (c. trav. art. précité). La problématique du droit d'accès de l'EC du CE : rappel - Pour opérer toute vérification ou tout contrôle entrant dans l'exercice de ses missions, l'expert comptable a accès aux mêmes documents que le commissaire aux comptes (c. trav. art. L. 2325-37). Or le commissaire aux comptes peut étendre ses investigations auprès des sociétés mères ou filiales (c. com art. L. 823-13 et L. 823-14). En outre, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, l'expert comptable assistant le CE dans le cadre de l'examen des comptes annuels est le seul à même d'apprécier la nature des documents utiles à l'exercice de sa mission et il peut mener des investigations auprès d'autres sociétés du groupe (notamment cass. soc. 16 mai 1990, n° 1990 P, et 8 novembre 1994, n° 4412 P). En revanche, il ne peut exiger la production de documents complémentaires n'existant pas et dont l'établissement n'est pas obligatoire pour l'entreprise (cass. soc. 27 mai 1997, n° 2300 BPF). La Cour de cassation ne s'est pas encore prononcée sur le périmètre d'investigation de l'expert comptable dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques, introduite par la loi 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi. Arrêt de cour d'appel - La cour d'appel de Paris vient d'astreindre une société à communiquer à l'expert comptable du comité d'entreprise assistant ce dernier dans la consultation sur les orientations stratégiques, en l'assortissant d'une astreinte et en faisant courir le délai de 2 mois de consultation du CE à partir de leur remise, les documents suivants (CA Paris 15 juillet 2016, n° 15/24432) : -stratégie à 3 ans de la division D du groupe à laquelle appartient la société ; -stratégie à 3 ans du groupe auquel appartient la société ; -détails des sites de la division D incluant les produits fabriqués et les conditionnements, ainsi que leur caractéristique ; -enjeux de compétitivité et performances attendues du site, notamment les écarts de performances mesurés ("benchmark", méthodologie, périmètre, périodes, indicateurs) vis-à-vis des aures sites de la division. Notons que : - n'a pas été retenu l'argument selon lequel il s'agissait des orientations stratégiques de la société (c. trav. art. L. 2323-10) et non pas du groupe, sachant qu'à compter du 1er janvier 2016, un accord de groupe peut prévoir que la consultation sur les orientations stratégiques est effectuée au niveau du comité de groupe (c. trav. art. L. 2323-11 modifié par la loi 2015-994 précitée) ; -la cour d'appel de Lyon avait récemment jugé, dans le même sens, que l'expert comptable du CE, alors même que la consultation vise clairement la stratégie de l'entreprise, ne peut se voir refuser les éléments d'orientation stratégique du groupe auquel elle appartient, pour comprendre les orientations stratégiques de cette dernière dans le contexte d'une très forte imbrication entre la mère et ses filiales, avec définition et contrôle de l'essentiel des données stratégiques par le groupe. En effet, dans le cas jugé, l'entreprise ne disposait d'aucune autonomie réelle, les engagements contractuels cadrant son activité et conditionnant ses objectifs pour la durée d'exploitation étant signés par le président du groupe (et non celui de l'entreprise concernée) (CA Lyon 8 janvier 2016, n° 14/09041). CA Paris 15 juillet 2016, n°15/24432 |